Espagne : Nouvelles priorités

Source : Bilan du Monde, édition 2005

Le projet de budget 2005 est cohérent avec les promesses électorales de José Luis Rodriguez Zapatero et avec les critiques formulées par son parti, le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE), à l’encontre de l’ancien gouvernement du Parti Populaire (PP).

Ce premier budget socialiste, a déclaré Pedro Solbes, le ministre de l’Économie et des Finances, vice-président du gouvernement, doit mettre en place « un nouveau modèle économique », fondé sur l’augmentation de la productivité, la transparence et l’équilibre budgétaire. M. Solbes compte fermer l’exercice 2005 avec un déficit de 0,5 p. 100, compensé par un excédent de 0,7 p. 100 de la Sécurité sociale (qui en Espagne ne couvre pas les dépenses de santé).

Comme on pouvait s’y attendre de la part d’un gouvernement de gauche, les dépenses sociales vont augmenter fortement, de 9,5 p. 100, et représenteront 50,1 p. 100 du budget, soit un peu plus de 125 milliards d’euros. En particulier, la partie concernant les retraites est en hausse de 6,8 p. 100 et les politiques en faveur de l’emploi en hausse de 7 p. 100, mais ce qui a surtout retenu l’attention, c’est ce qui est destiné à l’accession au logement, qui augmente de 32,5 p. 100. En réalité, les 878,61 millions d’euros prévus sont très insuffisants pour mettre en route le plan ambitieux annoncé par José Luis Rodriguez Zapatero, qui a été repoussé à 2006.

La construction était jusqu’à présent l’un des moteurs de la croissance avec la consommation. Le « nouveau modèle économique » que veut mettre en place Pedro Solbes impose un changement de cap et un retour vers l’amélioration de la productivité, qui n’a augmenté, entre 1996 et 2003, durant les législatures du PP, que de 0,7 p. 100 au lieu de 1,7 p. 100 en moyenne les années précédentes. Ainsi les dépenses pour l’innovation, la recherche et le développement sont de 3,6 milliards d’euros (hors dépenses militaires), en augmentation de 25 p. 100, ce qui peut paraître beaucoup, mais le point de départ est très bas (1 p. 100 du PIB). Les dépenses en infrastructures augmentent de 9 p. 100 et les investissements dans l’éducation sont en hausse de 6 p. 100. En particulier, la partie destinée aux bourses destinées aux étudiants, qui avait été réduite par le précédent gouvernement, remonte de 10 p. 100.

Le gouvernement a voulu également marquer son souci de « s’adapter aux nécessités du combat contre les nouveaux risques et menaces de ce siècle ». Le budget des services secrets est en hausse de 17 p. 100, le coût de la lutte contre l’insécurité frôle les 7 milliards d’euros (dont 61 p. 100 sont destinés à la lutte contre le terrorisme international). Par ailleurs, le budget de la défense sera de 7 milliards d’euros, dont près de 2 milliards iront à la modernisation des forces armées.

À la différence de M. Aznar qui s’était gaussé de l’exception culturelle à la française, « appropriée pour une culture en déroute » selon lui, le gouvernement actuel a augmenté les fonds de la politique culturelle de 6,5 p. 100, soit 982 millions d’euros, dont 66 p. 100 destinés à l’aide au cinéma.

En fin de compte, les ministères qui devront faire preuve de la plus grande austérité, outre le ministère du Logement, sont ceux de l’Économie et des Finances et des Affaires étrangères. Pour mettre en œuvre cette politique, Pedros Solbes table sur la bonne santé des entreprises qui permettrait des rentrées d’impôts et de cotisations sociales en augmentation de 6 p. 100. Le vrai risque tient à l’augmentation du prix du pétrole, budgétisé pour 35 euros par baril et dont les bonds ont obligé Pedro Solbes à revoir son budget ainsi que la croissance initialement prévue à 3 p. 100.

Martine Silber
 

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