POLITIQUE ANDORRANE

    Le développement démographique et social, conséquence de l’essor économique qui s’est produit depuis 1960, a profondément marqué l’Andorre, à tel point que, par décret en date du 15 janvier 1981, les co-princes ont engagé un processus de réforme des institutions qui, tout en accueillant les aspirations du peuple andorran, sauvegardera les prérogatives institutionnelles des co-princes, car la principauté demeure sous «la souveraineté personnelle, exclusive, conjointe et indivise des co-princes» qui délèguent leurs pouvoirs à des représentants: les viguiers, chargés de maintenir l’ordre public et d’exercer certaines fonctions judiciaires, ainsi qu’à deux délégués permanents, celui de l’évêque et celui du président (le préfet des Pyrénées-Orientales), qui disposent du pouvoir législatif et constitutionnel.
    Les assemblées élues du peuple andorran
    Le droit de vote est désormais accordé à tous les Andorrans et Andorranes âgés de dix-huit ans (décret du 7 sept. 1985). L’éligibilité est possible dès vingt-cinq ans, sauf pour les fonctions de syndic général, sous-syndic général et cap de govern pour lesquelles le candidat doit être âgé de trente ans au moins.
    Chaque paroisse élit un Conseil avec à sa tête un consol major et un consol menor . Les sept paroisses d’Andorre élisent, chacune tous les quatre ans, quatre conseillers pour former le «Très Illustre Conseil général des Vallées» qui élit un syndic général et un sous-syndic.
    Le Conseil général a élu pour la première fois le 15 janvier 1982 pour quatre ans un cap de govern qui a nommé quatre membres pour former un Conseil exécutif (qui peut comprendre jusqu’à six membres). Ce Conseil a pour tâche d’exécuter les décisions du Conseil général, de lui proposer des textes et d’exécuter le budget. Il dirige et contrôle l’administration. Dans les cas graves, le Conseil général convoque une assemblea magna qui, outre le Conseil, comprend les consols des paroisses.

Système judiciaire et législation

    Au civil, les batlles jugent en première instance, le juge des appellations en deuxième instance et le tribunal supérieur de la mitre (à la Seu d’Urgell) ainsi que le tribunal supérieur du président (à Perpignan) en troisième instance. Au pénal, les batlles sont compétents en matière de contravention et le tribunal des corts pour les crimes et délits. Ce tribunal est composé d’un président, le juge des appellations, et d’assesseurs, les viguiers et batlles. Les condamnés purgent leur peine de prison à leur choix, en France ou en Espagne. Le ministère public est confié à un procureur général.
    Le droit coutumier est consigné dans deux recueils, le Manual Digest (1748) et le Politar (1753). Il est complété par le droit romain, la coutume de Catalogne et par les lois et décrets émanant des délégués permanents, des viguiers et du Conseil général. Depuis 1984, de nouveaux codes ont été adoptés: procédure pénale (1984), nationalité (1985), administratif (1989), ainsi que la loi sur les droits de la personne (1989). En accord avec les co-princes, le Conseil général a entrepris en 1991 la rédaction d’une Constitution.

Statut international

    On ne peut plus prétendre aujourd’hui qu’Andorre n’est pas un État souverain, ni même un État. Les théories faisant de l’Andorre un co-protectorat ou un fief sans existence internationale ne résistent pas à la réalité des faits, car Andorre possède tous les éléments propres à un État: territoire, population, organisation politique et administrative, système judiciaire et législation propres du pays. En outre, Andorre est reconnue de façon bilatérale ou multilatérale, notamment par les États qui ont étendu à ce pays la compétence territoriale de leurs consulats établis en France ou en Espagne. Le président de Gaulle, en 1960, a établi la pratique de deux lettres de provision et de deux exequatur, l’un pour la France, l’autre pour l’Andorre. Depuis 1973, le co-prince épiscopal accorde également l’exequatur.
    En outre, depuis la conférence universelle sur les droits d’auteur (Genève, 1952), l’U.N.E.S.C.O. a invité régulièrement l’Andorre à participer à ses réunions. Depuis la XXXIVe conférence internationale d’éducation (Genève, 1973) et les réunions du comité intergouvernemental des droits d’auteur (Paris, 1973 et 1975), l’Andorre est représentée par un observateur andorran nommé par les deux co-princes.
    L’Andorre a également été invitée à la conférence sur la protection des biens culturels en cas de conflit armé (La Haye, 1954), à la conférence de révision de la Convention universelle sur le droit d’auteur (Paris, 1971) et à la conférence sur la protection des producteurs de phonogrammes (Genève, 1971).
    Par ailleurs, à la fin de décembre 1982, les co-princes, d’un commun accord, ont décidé de poser officiellement la candidature de l’Andorre comme membre de l’Union internationale des télécommunications (U.I.T.). Le vote eut lieu par correspondance, cent trois États répondirent favorablement. Toutefois, plusieurs réponses étant parvenues après la date limite fixée, la majorité des trois quarts requise ne fut pas atteinte en temps voulu.
    L’Andorre est partie à la Convention universelle sur les droits d’auteur (Genève, 1952), et de nombreux accords techniques dans le domaine de la sécurité sociale et des télécommunications ont été passés avec les organismes correspondants d’Espagne et de France. Depuis 1987, des relations se sont établies entre le Conseil de l’Europe et Andorre; le 1er juillet 1991 est entré en vigueur l’accord commercial et d’union douanière (pour les produits industriels) avec la C.E.E.

Problèmes politiques

    Les conflits politiques et de personnes sont fort vifs en Andorre. En 1991, notamment, la majorité du Conseil général a pratiquement paralysé l’action du gouvernement pendant toute l’année. Andorre avait connu dans le passé des émeutes nécessitant l’intervention des gendarmes français ou espagnols, notamment en 1881 et en 1933. Les conflits avec les co-princes ne sont pas rares et vont quelquefois jusqu’à la rupture des relations et au blocus économique (1953). L’ambiguïté du Pareatge (pariage) de 1278 a également pesé sur les relations entre les co-princes et des dissensions parfois graves ont éclaté, surtout lorsque l’évêque a voulu affirmer sa volonté d’agir en chef d’État (vers la fin du XIXe siècle).
    L’avènement en 1971 de Mgr Joan Martí i Alanís et une plus large ouverture d’esprit des présidents de la Ve République ont permis la rencontre historique du 25 août 1973, à Cahors, entre l’évêque et le président Pompidou, politique poursuivie par les présidents Giscard d’Estaing et Mitterrand (rencontres d’Andorra la Vella, oct. 1978 et sept. 1986). Le président de Gaulle avait bien visité l’Andorre en 1967, mais sans rencontrer l’évêque. Les contacts personnels entre co-princes avaient permis de décrisper la situation et conduit au décret du 15 janvier 1981 concernant le processus de réforme des institutions andorranes.